Qui se souvient de l’émission Mystères se rappelle certainement du reportage sur le Château de Veauce ! Surplombant les plaines de l’Allier, en Auvergne, cette forteresse du 9ème siècle est devenue célèbre, dans les années 1980, grâce à son propriétaire d’alors, Ephraïm Tagori de la Tour, qui prétendait être visité chaque nuit par un fantôme prénommé Lucie.
Intrigués par cette rumeur, les médias se sont emparés de l’affaire, à commencer par France Inter. Dans la nuit du 4 août 1984, l'équipe du journaliste Jean-Yves Casgha, spécialiste des reportages sur l’étrange, assistés d’un médium et de sa petite-fille, auraient été témoins de l’apparition de la dame blanche dans les hauteurs du château. Ils auraient même gardé des traces tangibles de leur rencontre avec Lucie : "Dans cette tour fut, pour la première fois au monde, photographié et enregistré un fantôme" .
Décriées par des zététiciens , ces "preuves" ont alors contribué à médiatiser le château et son excentrique propriétaire. Invité des plateaux de télévision, il s’est amusé à raconter son histoire, multipliant les anecdotes, avec émotion, jusqu’à sa mort.
Que reste-t-il de cette expérience ?
La légende du fantôme est-elle toujours d’actualité au château de Veauce ? Maison-Hantee.com est remonté aux sources de l’affaire avant de se rendre sur place auprès de la nouvelle propriétaire. Une visite hors du commun !
Douze siècles nous contemplent…
Construit vraisemblablement en 808 par Charlemagne (6) pour son fils, Louis Le Débonnaire, le vaste château, aujourd’hui classé Monument Historique, fut complété au fil des siècles par de nombreux éléments architecturaux jusqu’à devenir baronnie en 1400, comme l’atteste des armoiries surmontant une grille de style gothique flamboyant. L’édifice est flanqué de cinq tours : la tour carrée, la plus ancienne, le donjon avec sa tour de guet, la tour crénelée où se situaient les prisons, la tour de l’horloge dont le mécanisme – encore en activité ! – date de 1795 et la tour hexagonale.
A l’origine propriété d’un sire de Veauce, qui possédait le droit de justice sur les terres avoisinantes, la seigneurie de Veauce fut érigée en baronnie, au début du 15ème siècle, par le Roi Louis II de Bourbon en faveur du chevalier Robert Dauphin, seigneur de Royne et de Veauce.
Après la mort de Charles de Bourbon, Connétable de France, le château de Veauce releva directement de la Couronne. Dès lors, plusieurs familles illustres s'y sont succédées. En très mauvais état au milieu du 19ème siècle, Charles Eugène de Cadier, Baron de Veauce, a conduit, entre 1841 et 1846, les importants travaux de rénovation qui lui donnèrent son aspect actuel. En 1973, le Baron Eugène de Cadier céda le château à Monsieur Ephraïm Tagori de la Tour, premier porte-parole de la hantise.
Lucie
Dans les couloirs silencieux du château, on peut admirer plusieurs représentations du fantôme de Lucie, la Dame Blanche de Veauce. Dans la galerie des peintres, au 1er étage, la grande toile de Marcel Hasquin, titrée "Les mystères du château de Veauce", immortalise la légende de Lucie dans un mouvement tourbillonnant. A l'entrée de la galerie des vitraux, une peinture sur soie de Daniel de Chaumant met en scène le fantôme s'évadant de sa prison.
D’après les témoignages de M. Tagori de la Tour, le fantôme de Lucie hanterait le chemin de ronde et la salle des pendus depuis le 16ème siècle.
Vers 1560, la belle et jeune domestique au château, Lucie, fut courtisée par le Baron de l’époque, Guy de Daillon, bien que marié. Alors qu’il était parti guerroyer, la Baronne, jalouse, en profita pour jeter Lucie dans la prison de la tour dite "mal coiffée", où elle mourut de faim, de froid et de peur. Depuis, elle revient certaines nuits honorer la mémoire de son funeste sort.
Depuis 2002, date à laquelle elle a acquis le château, Elisabeth Mincer n’a jamais croisé le fantôme de Lucie. Mais elle avoue que certains hôtes qui ont séjourné à Veauce l’ont l’aperçu pendant la nuit, dans leur chambre. Témoignage digne de foi ou bluff marketing ? En tous cas, l’affaire du fantôme de Veauce n’a pas manqué d’intéresser le zététicien Erick Maillot, il y a une dizaine d’années.
La nuit des tous les mystères
Août 1984, Jean-Yves Casgha, journaliste qui "a du mal à croire aux fantômes", organise une veillée nocturne pour obtenir des traces de l’existence du fantôme. Avec l’accord de M. Tagori de la Tour, il fait installer des micros dans le chemin de ronde et dans la salle des pendus, où doit, selon les dires du propriétaire, se manifester Lucie. En compagnie de ses collaborateurs, du parapsychologue Raymond Réant et de sa petite-fille Aurore, Jean-Yves Casgha attend le mystérieux phénomène. A minuit, Aurore aperçoit une lueur fantomatique près d’une fenêtre. Alors qu’elle se précise, la fillette tente d’entrer en communication avec la silhouette lumineuse. Le médium prend des photos. La lueur sort de la salle et emprunte le chemin de ronde. C’est alors que le technicien radio, en régie dans une autre salle, perçoit un bruit strident qui le pousse à enlever son casque et rejoindre précipitamment le groupe.
Casgha est convaincu que le sifflement enregistré a été provoqué par le passage de Lucie. En outre, l’une des photos du médium a révélé une forme lumineuse, ovoïde et floue. Une authentique manifestation spectrale a-t-elle été photographiée et enregistrée cette nuit-là ? Le zététicien en doute.
D’après lui, l’anomalie sonore pourrait s’expliquer par la condensation, fréquente les nuits d’été, dans les vieux châteaux, et suffisante pour "provoquer la fuite du courant à fort voltage d’un condensateur de microphone". Il regrette aussi que le matériel photographique utilisé, notamment la pellicule du médium, n’ait pas été analysé pour garantir l’authenticité de la "photo de Lucie".